2 novembre 2013 Minuit Baden-Baden 2 November 2013 midnight

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La Dame aux Camélias

« Ce sera donc notre dernier rendez-vous…pour l’instant. »

Il ne m’apprenait pas une grande nouvelle. J’avais reçu dans l’après-midi un message précis de l’EDITEUR : « Vous avez visiblement épuisé les joies des thermes de Baden-Baden. J’ai accepté ce long intermède pour que vous ayez le temps de faire connaissance – approfondie – de votre double, de parcourir ses écrits et de marcher dans ses pas. Mais demain, vous partirez pour l’étape suivante. Il n’est que temps de revenir à l’exploration des vertus des eaux thermales. C’est bien la mission que je vous ai confiée, n’est-ce pas ? »

Et j’avais trouvé en lien ma feuille de route. « En passant par la Lorraine », comme dit la chanson, vous allez rejoindre l’Auvergne. Un rendez-vous « Café de l’Europe » est prévu avec vos compagnons. »

Du coup, Groddeck a très vite sorti ses dernières cartes – ou plutôt ses dernières photographies.

« Je passe très vite sur Marie Duplessis. Je vous ai préparé une sorte de paquet cadeau. Imaginez la silhouette de la « Dame aux Camélias », passant en 1842 comme une ombre un peu maladive dans les rues de la ville et écoutez ce bel enregistrement de « La Traviata ». Ce sera en quelque sorte une musique d’adieu. Je vais ensuite retourner à ma correspondance posthume. Je vais toutefois vous présenter une autre personnalité à mon avis injustement oubliée : Thérèse Lachmann. C’est cadeau, comme on dit à votre époque ! »

Et il s’évanouit en me laissant une sorte de biographie plutôt émouvante. Si je connaissais le nom, j’ignorais sa vie !

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La Paiva

Thérèse Lachmann, fille d’un tisserand, est née en 1819 dans le ghetto juif de Moscou. À 17 ans, elle épouse un ami de son père, le tailleur Antoine Villoing. Mais après deux ans, elle s’enfuit à Paris où sa première préoccupation est de se constituer une garde-robe qui l’aide à trouver un riche amant. Par chance, à Bad Ems, elle rencontra le pianiste Henri Herz, qui l’héberge à Paris avec sa famille et lui offre une vie somptueuse avec une garde-robe coûteuse, des bijoux et qui lui apprend les usages du monde. Richard Wagner et Hans von Bülow faisaient partie des invités de Thérèse.

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Henri Herz

Cette vie a pris fin lorsque Henri Herz est parti pour une tournée de concerts en Amérique. De ce fait, elle se retrouve à la porte !

Après des années de privation, elle arriva en Angleterre « avec une nouvelle garde-robe », trouve un protecteur et voyage avec lui à Baden-Baden, où elle rencontra le duc portugais de Paiva-Araujo, avec qui elle se marie puisque son mari était mort entre-temps.

Cependant, le temps passé avec le riche marquis n’a pas duré bien longtemps. Il se retira au Portugal. La Paiva, comme on appelait désormais Thérèse, séjourna à Paris et mena une vie de luxe dans la plus élégante maison des Champs-Élysées.

Après la guerre franco-prussienne de 1870-71, le deuxième mariage de Paiva fut annulé et elle épousa cette fois le comte de Prusse. La popularité de la comtesse, désormais allemande, s’était bien entendu évanouie à Paris, en raison de son attitude amicale à l’égard de l’empire allemand.

En 1878, Thérèse et Guido Henckel von Donnersmarck quittèrent la France et vécurent en Silésie, au château de Neudeck, où Thérèse mourut en 1884.

Voilà donc une belle histoire européenne, comme l’EDITEUR nous en demande pratiquement chaque jour.

Et, comme il le dirait lui-même : « La suite au prochain épisode ».

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Marie Duplessis

 

Thus « It will be our last meeting … for a while. »

It was not a big piece of news.

I had received in the afternoon a precise message of the PUBLISHER: « You apparently went plenty through the pleasures of the thermal baths of Baden-Baden. I accepted this long interlude so that you took the necessary length of time to get acquainted – going deeper into – with your double, to examine its papers and to walk in his steps. But tomorrow, you will leave for the following stages. It’s time to return to the exploration of the virtues of thermal waters. It is your mission, right? »

 
And I found in link my road map. « Via the Lorraine« , as says the song, you go to join Auvergne. A meeting « Café of Europe » is planned with your companions.

As a result, Groddeck very fast took out his last cards – or better said his last photos.

« I pass very fast on Marie Duplessis.

 I prepared for you a kind of gift-wrapped parcel. Imagine the silhouette of the « Lady of the Camellias« , passing in 1842 as a sick shadow in the streets of the city and listen to this beautiful recording of « La Traviata« . It will be in a way a farewell music. I am then going to return to my posthumous correspondance. I will however introduce another personality – in my opinion inequitably forgotten: Thérèse Lachmann. »

And he disappeared, leaving me read a kind of rather moving biography.

If I knew the name, I ignored her life!

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Thérèse Lachmann, daughter of a weaver, was born in 1819 in the Jewish ghetto of Moscow. At the age of 17, she married a friend of his father, the tailor Antoine Villoing. But after two years, she went away in Paris where her first concern was to establish a wardrobe which could helps her find a rich lover. Luckily, in Bad Ems, she met the pianist Henri Herz, who welcomed her in Paris as part of his family and offered a luxurious life with an expensive wardrobe, jewels and who made her obvious the uses and behavior of the high-society.

 

La Paiva

 

Richard Wagner and Hans von Bülow were some of the guests of Thérèse.

This life came to an end when Henri Herz departed for a concert tour in America.

Therefore, she found herself homeless!

 

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After years of difficulties, she arrived in England « with a new wardrobe« , found a protector and traveled with him to Baden-Baden, where she met the Portuguese duke of Paiva-Araujo, to whom she married because her husband had died meanwhile.

However, the time spent with the rich marquess did not last a very long time.

Paiva, as one called Thérèse, stayed in Paris and lived a luxury life in the most elegant house of the Champs-Elysées.
After the French-Prussian war of 1870-71, the second marriage of Paiva was cancelled and she married this time the count of Prussia. The popularity of the countess, from now on German, had naturally fainted in Paris, because of its friendly attitude towards the German empire.

In 1878, Thérèse and Guido Henckel von Donnersmarck left France and lived in Silesia, in the castle of Neudeck, where Thérèse died in 1884.

Here is thus a beautiful European story, as the PUBLISHER asks for practically every day.

And, as he would say: « follow the next episode.

 

31 octobre 2013 Minuit Baden-Baden 31 October 2013 midnight

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La conclusion de l’histoire ?

J’avais encore beaucoup de questions à lui poser. Et de surcroît, il n’avait pas terminé d’étaler sa collection de photographies.

« Vous voulez connaître la fin, bien sûr ? »

J’ai eu envie de lui répondre : « J’espère que sa vie se termine mal et qu’elle subit la vengeance de Dieu ». Mais je me suis bien sûr abstenu, d’autant plus que je n’en pensais pas un mot.

« Bien sûr, recommencer, signifiait pour elle de toucher le fond et Cora a dû recourir au travail dans la rue. Tout s’est amélioré quand elle a fait la connaissance de Monsieur Roubisse, un proxénète de premier ordre. Il a compris son potentiel et a passé un certain temps à la préparer pour l’entrée dans la haute société. En 1860 elle a fait « son début dans le monde » avec un succès instantané. À l’époque, la France était un empire – le Deuxième Empire français, gouverné par Napoleon III. »

Un début prometteur, mais rien n’était achevé, en particulier son entrée dans le très grand monde, en côtoyant cependant le demi-monde et en bénéficiant d’une situation financière enviable !

« La première conquête majeure de Cora a été Francois Victor Massena, le Duc de Rivoli, le Prince d’Essling, un enthousiaste de d’ornithologie. Il a été enchanté par Cora, la couvrant de cadeaux et d’argent, payant pour son personnel et achetant son premier cheval. Cora s’est mise en selle  » comme une Amazone « , comme le note un de ses admirateurs. Son talent de cavalière l’a considérablement aidée pour sortir de la foule et lui a ouvert une avenue pour attirer un grand nombre d’amants supplémentaires incluant le Prince Guillaume d’Orange, l’héritier du trône des Pays-Bas (connu à Paris comme  » le Prince de Citron  » en raison de son exilé volontaire dû au fait que ses parents ne le laissèrent pas épouser la femme qu’il avait choisie. Francois ne semble pas avoir été un amant jaloux et a été aussi enclin à pourvoir d’argent les visites de Cora aux maisons de jeu de Paris – une habitude dans laquelle elle avait sans aucun doute acquis à Argyll Room. »

Je n’avais pu m’empêcher de rire devant cette accumulation – que je soupçonnais bien entendu, mais qu’il me faisait toucher du doigt, dans une sorte de réalité photographique où je m’imaginais très vite que les beaux costumes allaient s’animer et nous rejoindre, comme si nous étions nous-mêmes une compagnie princière.

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Orphée aux enfers

« On raconte beaucoup d’histoires sur les exploits de Cora dans la haute société pendant les années 1860 (incluant une histoire tristement célèbre où elle aurait servi nue sur un plateau d’argent), quoiqu’il soit difficile de séparer la vérité de la fiction. Il est par contre certain qu’elle est apparue sur scène en Cupidon dans une production d’Orphée aux enfers de Jacques Offenbach … »

Il s’interrompit, comme pour reprendre son souffle avant d’atteindre le climax de son histoire et d’évoquer, comme si c’était une évidence, les aspects économiques de l’aventure :

2 prince_jerome« … En 1868 elle a a décroché son amant « à long terme » le plus notable – Napoléon Joseph Charles Paul Bonaparte, d’habitude connu comme le Prince Jérôme Napoléon, le cousin et un proche conseiller de l’Empereur. En fait, une soirée en sa compagnie pouvait coûter près de dix mille francs – environ 200,000 £. Sa collection de bijoux a été estimée à un million de francs, sans parler de ses chevaux, maisons et des robes. (On rapporte qu’elle avait reçu une facture de lingerie pour 18,000 £.) »

 

 

 

Jérôme Bonaparte

J’attendais toujours la punition finale. Elle vint avec évidence, mais par étape, en suivant les déconvenues historiques du Second Empire. Perte des colonies, conflit de 1870, exil de la famille Bonaparte à Londres, exclusion de la belle et retour dans la capitale française redevenue républicaine, en passant par la case sanglante de la « Commune ». Un tout autre environnement que celui des années 60.

Il voulait en finir.

« Cora a été forcée de se rendre compte que la fête était terminée. La fin a été accélérée par le manque total de la part de Cora de quelque perspicacité financière que ce soit. Si elle avait liquidé sa fortune et l’avait investie, elle aurait pu conserver une situation confortable, mais elle voulait se séparer de ses maisons, bijoux et des chevaux et les a vendus peu à peu jusqu’à ce qu’elle n’ait plus rien. Avant 1880 elle avait juste de quoi survivre et en 1883 elle est retournée à la prostitution directe pour se maintenir à flots, louant un appartement à Paris où elle a reçu des clients de la classe moyenne, bien loin de ses jours de gloire. »

Autrement dit, la morale est sauve ?

« Vous serez récompensé de votre patience : voilà la fin. Un de ses vieux amis l’a rencontrée en 1885 à l’extérieur d’un casino à Monte-Carlo, « pleurant pitoyablement, gardant cependant une certaine prestance, mais très débraillé ». Cette année-là, elle a vendu sa dernière maison et s’est déplacée dans une pension. Dans une vaine tentative de rétablir sa fortune, elle a écrit ses mémoires, mais en raison de sa discrétion (ou de la pression exercée sur elle) le dernier coup de dés de Cora a manqué son but – les noms ont été cachés et les détails étaient absents, entraînant des ventes réduites, la maintenant dans l’obscurité. Ceci dit, même si ses mémoires avaient rencontré le succès, ils n’auraient pas pu la sauver. Elle souffrait déjà du cancer intestinal et le 8 juillet 1886 la maladie a mis fin à sa vie. Ses obsèques ont été solitaires, mais un de ses anciens amants a anonymement couvert les frais pour s’assurer qu’on lui montrerait le respect qu’elle avait cependant mérité. Elle a été enterrée dans le Cimetière des Batignolles, dans son Paris bien-aimé, sous le nom qu’elle avait abandonné, Emma Eliza Crouch. Sa mort a été rapportée dans des journaux du monde entier, un dernier rappel d’un monde scintillant maintenant parti pour toujours. »

Au fond, je n’étais pas si satisfait que cela. Le récit avait été cette fois si long que la nuit était très avancée. Mais je devrai rester encore quelques jours pour enfin entendre le récit de la « Dame aux Camélias »…

 

2 cora_wistfulThe end of the story? I had more questions to ask. And besides, he had not ended to display his collection of photos.

« You want to know the end, of course? »

I wanted to answer: « I hope that her life ends badly and that it undergoes God’s vengeance« . But, of course I didn’t.

Of course, starting over meant once again starting at the bottom, and initially Cora had to resort to working the street. Things improved when she made the acquaintance of Monsieur Roubisse, a high-class procurer. He saw her potential, and spent some time grooming her for entry to high society. In 1860 she made her “debut” and was an instant success. At the time France was an empire – the Second French Empire, ruled by Napoleon III.”

A promising beginning, but nothing was finished, in particular its entrance in the high society, by however living close to middle class areas and by benefiting from an enviable financial situation!

Cora’s first major conquest was Francois Victor Massena, Duke of Rivoli, Prince of Essling, and noted ornithology enthusiast. He was in love of Cora, showering her with gifts and money, paying for her staff and buying her first horse. Cora took to the saddle “like an Amazon”, as one admirer noted. Her skill at riding helped her to stand out from the crowd and gave her an avenue to attract a large number of additional lovers including Prince William of Orange, heir to the throne of the Netherlands (known in Paris as “the Lemon Prince” for his voluntary self-exile when his parents would not let him marry the girl he chose). Francois does not seem to have been a jealous lover and was also willing to bankroll Cora’s visits to the gambling dens of Paris – a habit she had doubtless acquired in the Argyll rooms.”

I did not have been able to stop laughing in front of this accumulation that I naturally guessed, but that he made me touch in a kind of photographic reality where I imagined quickly that the beautiful suits were going to liven up and to join us, as if we were ourselves a princely company.

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There are many stories of Cora’s exploits in high society during the 1860s (including one notorious tale where she had herself served naked on a silver platter), though it’s hard to separate fact from fiction. It’s well attested that she appeared on stage as Cupid in a production of Orphée aux enfers by Jacques Offenbach…”

 

 

Orphée aux enfers

 

He remained silent for a while, as to get his breath back before reaching the climax of the story and of evoking, as if it was an obvious fact, the economic aspects of the adventure:

“…In 1868 she snagged her most notable long-term lover – Napoléon Joseph Charles Paul Bonaparte, usually known as Prince Jerome Napoleon, cousin and close adviser of the Emperor. As a matter of fact, an evening in the company of Madame Pearl could cost up to ten thousand francs – about £200,000.) Her jewellery collection was valued at a million francs, not to mention her horses, houses and dresses. (She is reported have once received a lingerie bill for £18,000.)”

I still waited for the final punishment. It came as an obvious fact, but step by step, as a follow up of the troubls of the Second Empire. Loss of colonies, conflict of year 1870, exile of the Bonaparte family in London, exclusion from the beautiful lady and then back in the French capital now politically republican, via the bloody episode of the « Commune« . Quite a different environment than that of the 60s.

He wanted coming now to an end.

“Cora was forced to realise that the party was over. The end was accelerated by Cora’s complete lack of any financial acumen. Had she liquidated her fortune and invested it she might have been somewhat comfortable, but she was unwilling to part with her houses, jewels and horses, and so sold them all piecemeal until she was left with nothing. By 1880 she had just one house remaining, and in 1883 she returned to straight-forward prostitution to maintain herself, renting a flat in Paris where she took middle-class clients, a far remove from her glory days.”

In other words, the morality is safe?

You will be rewarded for your patience: this is the end: One of her old friends met her in 1885 sitting outside a casino in Monte Carlo, “weeping pitifully, handsome but much bedraggled”. That year she sold her last remaining house and moved into a boarding house. In an attempt to restore her income she wrote her memoirs, but discretion (or discreet pressure) undercut Cora’s last throw of the dice – names were obscured, and details were absent, dooming the book to poor sales and obscurity. Unknown to Cora, however, even if her memoirs had been a success they could not have saved her. She was already suffering from intestinal cancer, and on July 8th 1886 the disease claimed her life. Her funeral was sparsely attended, but one of her former lovers anonymously covered the costs to ensure that she would be shown the respect she deserved. She was buried in Batignolles Cemetery in her beloved Paris, under the name she had abandoned, Emma Eliza Crouch. Her death was reported in newspapers around the globe, a last reminder of a more glittering world now gone forever.”

At the end, I was not really satisfied. The narrative had been this time so long that the night was almost over.

But I shall have to stay still a few days in Baden-Baden to hear finally the narrative of the « Lady of the Camellias » …

30 octobre 2013 Minuit Baden-Baden 30 October 2013 midnight

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Comme s’il devait attendre la solennité d’un samedi soir, où l’hôtel s’est rempli à la fois de la bourgeoisie locale la plus compassée et de touristes d’arrière saison venus de l’Alsace voisine, j’ai encore dû attendre deux jours pour que l’on puisse aborder la vie de l’une des deux belles dont il avait promis de me montrer les photographies.

Cora Perarl…rien que le nom, que je ne connaissais pas avant de venir en Allemagne, était propre à m’intriguer !

 

De quel coffre à bijoux était-elle donc sortie, sinon de la petite boîte rempli de clichés détenus secrètement par Groddeck ?

« Il s’agit, malgré son nom, d’une française d’adoption. »

Devant mon air un peu interloqué, il s’empressa d’ajouter cyniquement : « La galanterie française, cher monsieur, quoi d’autre ? ».

« Ecoutez bien :

Une des femmes les plus infâmes de l’empire de Napoléon III est née Emma Crouch à Plymouth, en Angleterre. Elle est probablement née en 1835 quoiqu’elle ait prétendu plus tard être née en 1842, supprimant ainsi sept ans de sa vie. Son père, Frederick Crouch était un violoncelliste qui a aussi composé des chansons. Il a abandonné sa famille en 1847 et s’est enfui aux États-Unis.

Son récit commençait un peu par la biographie d’une modern Cendrillon.

« Frederick s’est remarié et a eu plusieurs autres enfants. Sa femme abandonnée, en attendant, a dit à ses enfants (incluant Emma) que leur père était mort et l’a rapidement remplacé par un riche amant. C’est la réalité de l’entrée d’Emma dans le monde d’adultes qui ont vécu leurs vies sans elle. Emma a été envoyée dans un couvent de Bourgogne, où elle a été éduquée, entre autres, aux bons usages de la société et à la langue française. Cela n’est certainement pas le seul enseignement qu’elle ait reçu. De plus on trouve des témoignages affirmant qu’elle avait eu plusieurs aventures avec des femmes lorsqu’elle était étudiante. »

De mieux en mieux…de quoi me réveiller définitivement, malgré l’heure tardive !

Il ne restait heureusement que quelques noctambules dans le fumoir de l’hôtel, mais un monsieur d’un certain âge a failli renverser son verre de cognac quand Groddeck a prononcé à dessein à voix haute « prostitution ». Il redressa la tête, pensant peut-être capter une bonne adresse. Heureusement le reste du portrait a été dressé à voix basse.

« Elle a quitté la maison de sa grand-mère et a loué une pièce à Covent Garden, où elle a été appréciée par une série de clients masculins. Elle a ensuite rencontré Robert Bignell, un individu extérieurement respectable (il était membre du conseil local de Brentford) et dont la profession officielle était le négoce des vins. Ce qui est la meilleure image de l’individu puisque la construction, au-dessus de son bar à vins, des Pièces d’Argyll a inauguré un tout autre chapitre. C’était avant que les boîtes de nuit ne soient devenues une partie de la culture officielle, mais les Pièces d’Argyll pourraient se féliciter d’être une de leurs toutes premières incarnation (mais avec le jeu plutôt qu’avec la musique, comme principale distraction). »

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Il me tardait néanmoins que l’on finisse par arriver en France, puis en Allemagne.

« Ayant géré au mieux sa situation de maîtresse officielle de Bignell avec talent, elle savait qu’elle pourrait en faire un vrai métier, quoiqu’elle sache aussi que son activité serait plus difficile à Londres. Le vrai changement est intervenu quand Bignell l’a emmenée en vacances à Paris. Elle parlait le français couramment et elle est tombée amoureuse de la ville. Quand il est retourné en Angleterre, elle est restée sur place – mais pas sous le nom d’Emma Crouch. Au lieu de cela elle s’est rebaptisée Cora Pearl. »

Il s’attendait peut-être à ce que je m’exclame : « Ah, Paris » ! Mais, même si j’en avais eu l’intention, il était déjà trop tard. Il avait disparu, comme le carrosse de Cendrillon.

Je devais attendre le lendemain pour connaître la fin de l’histoire.

 

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As if he had to wait for the solemnity of a Saturday evening, when the hotel was filled at the same time with the stiffest local bourgeoisie and with the tourists of back season coming from nearby Alsace, I had to wait two days more that we can approach the life of one of the two “beautiful ladies” of whom he had promised to show me photos.

 

Cora Perarl … only the name, I did not know her before coming to Germany, was appropriate to intrigue me! Of which jewelry box she had gone out, otherwise of the small safe filled with clichés held secretly by Groddeck?

 

« In spite of her name, she is French by adoption. »

Looking at my astonishment, he hurried up to add cynically: « The French gallantry, dear sir, what else?« .

 » Listen to, please:

One of the most infamous woman in the empire of Napoleon III, was born plain Emma Crouch in Plymouth, England. She was probably born in 1835 though she would claim later to have been born in 1842, shaving seven years off her age. Her father was Frederick Crouch, a cellist who also composed songs. He abandoned the family in 1847 and fled to the United States.

His narrative began slowly with the biography of a modern Cinderella.

Frederick remarried (bigamously) and had several more children. His abandoned wife, meanwhile, told her children (including Emma) that their father had died, and promptly replaced him with a rich lover. This was Emma’s introduction to how grown-ups lived their lives. Emma was packed off to a convent in Burgundy, where she was taught, among other things, etiquette and French. That may not have been the only education she received, however – there are stories that she had several lesbian affairs while she was a student.”

Better and better! Perfect story able to wake me definitively, in spite of the late hour!

“When she returned to England, she went to London to live with her grandmother. She got a job as a milliner’s assistant, selling hats. However, like so many young girls who came from the country to London, in 1855 she got drawn into the city’s massive prostitution industry. It’s claimed that this was the result of Cora being talked into visiting a bar with a man, drinking until she passed out, and then walking in a hotel bed with her virginity taken and £5 (around £250 in modern money) sitting on the nightstand.” 

There were fortunately only some night birds in the smoking room of the hotel, but a gentleman of a certain age, almost knocked down his glass of cognac when Groddeck pronounced on purpose in a loud voice « prostitution », thinking maybe of getting a good address. Fortunately, the rest of the portrait was told at a lower voice.

“She moved out of her grandmother’s house and rented a room in Covent Garden, where she entertained a series of gentleman callers. And then she met Robert Bignell. Bignell was an outwardly respectable gentleman (he was a member of the Brentford local council) who gave his profession as a wine merchant. What he is best remembered for, however, is the business he ran out of the building above his winecellar – the Argyll Rooms. This was before nightclubs became a part of culture, but the Argyll Rooms could make a claim to be one of their earliest incarnations (though with gambling rather than music as the main draw).” 

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He delayed nevertheless the step when she was supposed to reach France and Germany.

Having managed to become Bignell’s mistress so easily, she knew that she could manage it, though she also knew that her history in London would be a liability. It was when Bignell took her on holiday to Paris that the solution occurred to her. She spoke French fluently, and she fell in love with the city. When he returned to England, she stayed behind – but not as plain Emma Crouch. Instead she rechristened herself as Cora Pearl. »

He expected maybe that I exclaim: « Ah, Paris« ! But, even if I had intended to say it, it was already too late. He had disappeared as Cinderella’s coach.

I had to wait for the next day to know the end of the story.

28 octobre 2013 Minuit Baden-Baden 28 October 2013 midnight

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Je continue à apprécier l’automne du Baden-Würtemberg. Malgré tout, j’ai fait hier un aller et retour à Karlsruhe. Mais ce mois passé à Baden-Baden – un mois et trois jours pour être exact – est en quelque sorte l’équivalent de quelques journées dans le temps normal. Je pense que le bon docteur, dans sa correspondance, devait avoir inculqué l’idée du temps long à ses patients. Qu’est-ce qu’un mois en effet quand on cherche sa propre vérité ?

Pour seule nourriture intellectuelle Groddeck m’a quand même laissé une notice introductive pour alimenter notre prochaine conversation durant laquelle j’espère qu’il sortira les illustrations de sa boîte à images :

« A la fin du règne de l’Empereur Napoléon Ier, l’Europe s’est restructurée. Charles Joseph qui a voyagé en direction du Congrès de Vienne, en sait quelque chose. La richesse et le pouvoir de la noblesse et du clergé des siècles précédents avaient été transformés en forces politiques et sociales, ce qui donnait certes des chances de succès même aux personnes « …ayant des mœurs légères ». Elles – il s’agit bien de femmes en effet – ont su saisir les opportunités contemporaines pour acquérir richesse et pouvoir. Ce phénomène, réduit à un petit cercle, a été favorisé par la révolution industrielle émergente. Des capitaines d’industrie ont fait fortune, en influençant les affaires et la spéculation. Dans la plupart des cas, les femmes ont eu la possibilité d’acquérir une influence certaine dans ce monde où le plaisir est ainsi devenu un signe extérieur de richesse. Un aspect important s’est fondé sur le jeu des apparences, où la bourgeoisie montante a su retrouver, grâce à l’affichage de nombreuses courtisans, un certain aspect de la cour royale française du Grand Siècle, s’est ainsi poursuivi au XIXème siècle. Pour ce comportement, les Français ont inventé le terme de « Galanterie ».

Valery m’avait déjà fourni des nouvelles signées Guy de Maupassant qui mettent en scène ce même phénomène dans les villes thermales françaises. Dois-je en conclure que certaines mœurs sont chose commune en Europe ? J’aurai certainement l’occasion d’y revenir quand je reviendrai en Italie…

Le petit mot du jour de Groddeck ?

Le voici :

« Quelle entreprise difficile que de parler du « Ça » ! On pince une corde au hasard et, au lieu d’un son, il en retentit plusieurs dont les sonorités se mêlent, puis se taisent, à moins qu’elles n’en réveillent d’autres, toujours nouvelles, jusqu’à ce que se produise un tohu-bohu invraisemblable où se perd le bredouillement de la parole. »

J’apprends donc à pincer des cordes…

 queen-kurhaus Queen Victoria am Baden-Baden

I continue to enjoy the place and to rest in the beautiful atmosphere of the autumn in Baden-Würtemberg. Nevertheless, I made a round trip in Karlsruhe yesterday. But this last month in Baden-Baden – one month and three days to be precise – is in a way the equivalent of a few days in normal time. I think that the good doctor, in his correspondence, must have inculcated the idea of long time history to his patients. What one month could mean when one looks for his / her own truth?

For « intellectual food » Groddeck left me an introductory note in order to prepare our next conversation during which he will bring out the illustrations of his image box:

« At the end of the reign of Emperor Napoleon the First, Europe restructured. Charles Joseph who traveled in the direction of Vienna Congress, knows a lot about it. The wealth and the power of the nobility and of the clergy of the previous centuries had been transformed into political and social strengths. A situation which gave certainly chances of success to the people « aux moeurs légères » as French call them. They – it is obviously the case of women – knew how to seize the contemporary opportunities to acquire wealth and power. This phenomenon, reduced to a small circle, was favored by the emergent industrial revolution. Captains of industry made a fortune, by influencing the right business and speculation. In most of the cases, women had the possibility of acquiring a certain influence in this world where pleasure became a sign of wealth. An important aspect based itself on the game of appearances, where the rising bourgeoisie knew how to find, thanks to the presence of numerous sycophants. In this way, certain aspect of the French royal court of the Grand Siècle continued during the XIXth century. For this kind of behavior, French people invented the term of « Galanterie. »

Valery had already supplied me with the short stories of Guy de Maupassant which stage the same phenomenon in the French thermal towns. Do I have to conclude that from it that certain customs are common thing in Europe? I shall have certainly the opportunity to come back to the point when I’ll return in Italy …

The small daily paragraph of Groddeck? Here it is: « What a difficulty to speak about the “That”! We pinch a rope at random and, instead of it, several ones get involved in the same tone, then they keep silent, unless they wake up others, still news, until occurs an improbable jumble where gets lost the spluttering of the word. »

I thus learn to pinch some other ropes …

26 octobre 2013 Minuit Baden-Baden 26 October 2013 midnight

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Bien fait pour moi. J’aurais dû comprendre que la méthodologie psychanalytique de Grodeeck devait s’accompagner d’une leçon de patience. Il est reparti avant-hier avec sa boîte aux trésors en me laissant sur ma faim. Mais me faire jeûner, même au sens intellectuel du mot devait faire partie de son comportement avec ses patientes. Il utilise donc la même approche avec moi !

Je devrai, paraît-il attendre encore deux jours. En attendant de revenir sur le sujet des belles étrangères, il me reste les promenades et la relecture de ses textes. Heureusement Baden-Baden continue de me montrer ses plus beaux visages d’automne et les musées continuent à me sembler inépuisables, tout comme les livres d’archives accumulés dans la bibliothèque du Service du patrimoine.

Je dois bien me contenter de la citation du jour laissée intentionnellement à l’accueil de l’hôtel :

« Je ne vais pas vous ennuyer plus longtemps de mes paradoxes. Je préfère attirer votre attention sur une bizarre forme d’exhibitionnisme : celle de soi-même pour soi-même. Le miroir vous vient à l’esprit et, en même temps, le narcissisme, car Narcisse découvrit le miroir — et l’onanisme. Le miroir est un symbole de la masturbation ; et si vous avez, comme moi, un cerveau de jongleur, vous songerez que l’on se fait aussi des grimaces dans la glace, et cela, uniquement pour le plaisir ; l’exhibitionnisme peut dont être ambivalent : attirant et repoussant. »

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Mais je l’ai mise de côté aujourd’hui en relisant l’ouvrage qui me sert de guide au cours de la marche dans la forêt environnante.

Le « sentier de la nature sauvage de Baden-Baden« , inauguré en mai 2006, commence à l’hôtel Plättig et couvre une superficie d’environ 70 hectares. Il a été mis en place par le bureau forestier municipal. Le parcours atteint environ 4,5 kilomètres. Il se situe dans le district de Baden-Baden, mais borde les régions de Bühler et de Bühlertaler. Le projet a été réalisé avec le soutien de tous les résidents. De plus, les visiteurs peuvent découvrir la nature sauvage en suivant les étapes d’un véritable jeu. Des défis particuliers attendent en effet les visiteurs : Il faut parfois ramper sous les troncs d’arbres. On doit parfois patauger ou suivre un parcours de tremplins pour éviter les flaques d’eau, grimper sur les rochers pour regarder vers le bas sur l’accumulation des troncs renversés par la tempête de 1999, un peu comme un « jeu de Mikado ». 

Le Mikado est donc bien là pour me faire patienter !

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Good to experience! I should have understood that the psychanalitic methodology of Grodeeck had to come along with a lesson of patience. He left me the day before yesterday with his treasures box and I had just to feel happy, waiting to know more. I was starving, even in the intellectual sense of the word, being in the same situation as his patients had to practice.

He thus uses the same approach with me!

It seems that I have to wait for another two days. While waiting until knowing more about the beautiful foreigners, I have the possibility to walk and to review his texts. Fortunately Baden-Baden continues to know the most beautiful autumn faces and the museums continue to be inexhaustible, just like the books of archives which accumulated in the library of the Heritage Department.

I have to be happy with the day quotation left deliberately at the reception of the hotel:

« I am not longer going to bore you of my paradoxes. I prefer to draw your attention on a strange shape of exhibitionism: that of oneself for oneself. The mirror comes to your mind and, at the same time, narcissism, because Narcissus discovered the mirror – and onanism. The mirror is a symbol of masturbation; and if you have, as I, juggler’s brain, you will remember that we also make faces in the mirror only for the pleasure of it; the exhibitionism can be ambivalent: attractive and disgusting. »

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But I put aside it today to get time for the paper which serves me as a guidebook during the walking journey in the surrounding forest.

The « Path of the wild nature of Baden-Baden« , inaugurated May 2006, begins in the hotel Plättig and covers a surface of about 70 hectares. It was set up by the municipal forest office. The route reaches approximately 4,5 kilometers long. It is situated in the district of Baden-Baden but is linked to the regions of Bühler and Bühlertaler. The project was realized with the support of all the residents. Furthermore, the visitors can discover the wild nature by following the stages of a real game. Specific challenges wait for the visitors: it is sometimes necessary to crawl under tree trunks. Sometimes ramblers have to wade or follow an upper route in order to avoid puddles, to climb on rocks for looking downward on the accumulation of trunks knocked down by the storm of 1999, a little as a « The game of Jackstraws« .

The Jackstraw is certainly perfect to make me wait and to increase my lost and hidden quality of patience!

24 octobre 2013 Minuit Baden-Baden 24 October 2013 midnight

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Léonide Leblanc. Cliché Nadar. BNF Gallica.

Ce soir, Groddeck est arrivé très tard. Il a sorti d’une vieille sacoche en cuir patiné une boîte de métal fermée à clef. En l’ouvrant avec précaution, après avoir vérifié que tous les responsables de l’hôtel étaient suffisamment éloignés de notre table, il m’a glissé à l’oreille : « Rien que pour vous ».

Comme s’il ignorait que mon rôle est justement d’écrire jour par jour le récit de mes rencontres. J’ai appris, souvent à mes dépens, combien il sait cultiver les ambiguïtés, juste pour faire sortir des vérités cachées.

« Nous sommes entourés de spéculateurs. Cette ville les attire comme un véritable aimant. Malheureusement, ce ne sont plus aujourd’hui les élégants affairistes de la révolution industrielle. On a affaire à des hommes pressés qui parlent des langues slaves. Ils ont remplacé les hommes « courtois » du XIXème siècle ; mais le pouvoir de l’argent leur procure toujours la même sensation de toute puissance. Je suis certain que vous êtes peu informés des détours de cette courtoisie qui a conduit beaucoup d’entre-eux, outre leurs pertes au casino, à retrouver entre deux portes d’hôtels particuliers ou de villas secrètes des « Courtisanes » sans scrupules, mais non sans qualités ni bonnes manières. »

Je venais ainsi de comprendre quelle était la nature des photographies qu’il commençait de disposer sur la table de billard, délaissée à cette heure par les habitués. Le demi-monde faisait irruption dans la suite de nos conversations qui n’avaient touché pour l’instant à la sexualité que derrière le voile tendu de la psychanalyse. Ce soir, il avait eu envie d’entr’ouvrir le voile en question.

Première photographie : figurait ainsi en bonne place Léonide Leblanc. Une beauté un peu « épaisse » – qu’on me pardonne – mais sans doute « de son temps » et que Nadar a fort heureusement immortalisée pour que nous évitions de rêver sur des gravures improbables.

J’ai dû finir par arrêter mon visiteur nocturne dans son enthousiasme et surtout dans l’énumération des riches amants de la belle, en notant cependant au passage qu’il avait sorti une reproduction de l’appartement du Duc d’Aumale et que figurait également, entre deux « trésors » de sa collection, une peinture de Delacroix : « Femmes d’Alger dans leur appartement ». On comprendra aisément pourquoi je songeai immédiatement à relire Assia Djebar !

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Portrait de Marie Colombier par Edouard Manet

 

« Cette Léonide a fait sauter la banque » susurra Groddeck avec une sorte de gourmandise, lorsqu’il sortit une dernière gravure la représentant.

J’étais certain qu’elle n’avait pas fait sauter que la banque du casino, mais aussi d’autres comptes en banque plus privés, ainsi que des membres de gouvernements, par la grâce de secrets politiques qui, par son intermédiaire, ont transité sans obstacles d’un lit à l’autre, d’un pays à l’autre, pour le plus grand bien des diplomaties parallèles.

Rien que des scènes très convenables en somme sur ces clichés ! Des robes à la dernière mode, des bijoux sans égal, des intérieurs luxueux !

Mais je pense que Groddeck n’a pas compris pourquoi je me suis vite lassé de cette litanie soyeuse et dentellière… jusqu’à ce qu’il me réveille en sortant les deux dernières cartes de son jeu : Marie Duplessis, la fameuse Dame aux Camélias et l’inoubliable Cora Pearl.

C’est à ce moment-là que le pervers referma vite le coffret. « Nous en reparlerons demain ».

Pensait-il vraiment que j’allais garder ma quiétude d’esprit aussi longtemps ?

 

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Léonide Leblanc

This evening, Groddeck was very late. He brought out of an old leather skated saccoche a locked metal box. He opened it with cautious, and after having verified that all the persons in charge of the hotel were at a significative distance from our table, he whispered: « Only for you« . As if he ignored that my role is precisely to write day by day the narrative of my visits and encounters.

I learnt, sometimes at my expense, how much he knows how to live with ambiguities, just to help bring out the hidden truths.

« We are surrounded with speculators. This city attracts them as a real magnet. Unfortunately, they are not anymore today the elegant hucksters of the industrial revolution. These men are always in a hurry. They speak Slavic languages and replace the “courteous” men of the XIXth century; but the power of money still brings them smell the same sensation of power.

I am certain that you are partly informed about the bends of this courtesy which led a lot of them, besides their losses in the casino, find between two doors of mansions or secret villas some unscrupulous « Courtesans », splendid women – not without qualities nor good manners. »

Based on this last sentence, I just understood which was the nature of the photos which he began to put on the billiard table, abandoned at this hour by regular players. The half-world (demi-monde) penetrated suddenly our conversation, which had not touched for days at sexuality or only behind the tense veil of the psychoanalysis. This evening, he decided to half-open the veil.
The first photography presented at the right place Léonide Leblanc. A little bit “thick” beauty, if I may, but doubtless « Of her time » that Nadar fortunately imortalised so that we can avoided dreaming on improbable engravings.

I had to partly stop my night-visitor in his enthusiasm and especially in the enumeration of the rich lovers of the beautiful lady, by noting however among the images a reproduction of the apartment of Duke d’Aumale and by discovering between two « treasures » of his collection a painting of Delacroix: « Women of Algiers in their apartment« . One shall understand easily why I thought immediately to Assia Djebar!

Delacroix Alger« This Léonide broke the casino bank » whispered Groddeck with a kind of greed, when he brought out a last engraving representing her. I was certain that she had not only blown up the bank of the casino, but also more private bank accounts, as well as government’s secrets, by the favor of political pink links which, by her intermediary, passed without obstacles from a bed to the other, from a country to the other, for the biggest profit of parallel diplomacy.

Femmes d’Alger dans leur appartement. Eugène Delacroix.

 

Only very suitable scenes – as a matter of fact – in these images. They are pictured in the last fashion style, with priceless jewels and they live in luxurious environments!
But I think that Groddeck did not understood why I got rapidly tired of this silky and lace litany until he raised my interest anew by taking out the last two cards in his game: Marie Duplessis, famous Lady of the Camellias and the unforgettable Cora Pearl.
That is the right moment when the pervert guy closed the casket.

« We shall talk again about them tomorrow« .

Did he really think that I could wait quietly until next day?

22 octobre 2013 20H Baden-Baden 22 October 2013 8 pm

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Cliché Loiez Deniel

Voilà le temps devenu parfaitement immobile. Cela va faire bientôt un mois que je me suis établi à Baden-Baden. J’ai presque épuisé tous les livres que j’avais apportés avec moi et ceux que l’EDITEUR avait mis à ma disposition dans la bibliothèque de l’hôtel.

Un mois, comme une semaine. Des moments de marche, des passages dans les thermes pour mes comptes-rendus réguliers sur le thermalisme, des lectures…puis, à la nuit tombée arrivent les visiteurs, un peu comme des compagnons d’heures heureuses qui se délecteraient avec moi d’une nostalgie souveraine.

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Et Groddeck semble m’avoir adopté, un peu comme un animal de compagnie à qui on commente l’actualité avant de trouver le sommeil. Mais il s’agit bien en l’occurrence d’une actualité qui date de pratiquement un siècle !

« Un siècle, c’est justement l’espace de temps occupé par Marlene Dietrich. Et quand je dis « occupé », je suis certain que vous n’aurez pas manqué de noter toutes les acceptions du mot. Elle avait déjà plus de trente ans quand j’ai cessé d’écrire. Et pourtant, le pire comme le meilleur des ambiguïtés étaient encore devant elle. »

Et il demanda au responsable du bar qu’on trouve un vieux disque noir dans les armoires de la bibliothèque de l’hôtel afin que nous puissions nous couler parfaitement dans l’atmosphère appropriée.

« Vous connaissez certainement la phrase qu’on lui prête ? C’est vrai qu’on ne prête qu’aux riches et dans le cas présent, c’est bien aux riches du monde entier qu’elle s’adressait : “This is the most beautiful Casino in the world – and I know all of them”.

Passage lumineux, incandescent même !

Pourtant, je me souviens d’avoir écrit : « Il est certain que ces deux pulsions : exhiber et voir, occupent une grande place dans l’existence humaine et ont une influence sur tout ce qui est humain et trop humain. »

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La belle s’est certainement trop exhibée et pas toujours forcément au bon endroit, au meilleur moment. »

Et il est resté pensif, tout en fredonnant à mi-voix un air qui se dévidait sur la platine…

« Sag mir wo die Blumen sind, wo sind sie geblieben Sag mir wo die Blumen sind, was ist geschehen? Sag mir wo die Blumen sind, Mädchen pflückten sie geschwind Wann wird man je verstehen, wann wird man je verstehen?

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Je me suis plongé à ce moment-là dans la lecture du Badisches Tagblatt, Baden-Baden, du 24 mai 1960 que l’EDITEUR avait fait déposer dans ma chambre à l’intérieur de l’épais dossier de documents dont il avait deviné la nécessité absolue pour que je puisse nourrir mon blog de références.

Lorsque ma lecture s’est achevée, Groddeck avait disparu et c’est un disque de Barbara dont la voix cassée avait triomphé de la voix rauque de l’icone d’un cinéma évanoui.

 

« Bien sûr, ce n’est pas la Seine, 
Ce n’est pas le bois de Vincennes,
Mais c’est bien joli tout de même,
A Göttingen, à Göttingen.

Pas de quais et pas de rengaines
Qui se lamentent et qui se traînent,

Mais l’amour y fleurit quand même, 
A Göttingen, à Göttingen.

Ils savent mieux que nous, je pense,
L’histoire de nos rois de France,
Herman, Peter, Helga et Hans,
A Göttingen.

Et que personne ne s’offense,
Mais les contes de notre enfance,
« Il était une fois » commencent
A Göttingen. »

 

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Photo Loiez Deniel

What about my mood? Perfectly motionless. I am going to reach soon one month stay in Baden-Baden. I almost red all the books which I had brought with me and those that the PUBLISHER had provided for me in the library of the hotel.
One month, as a week. Moments of walking, visits in thermal baths for my regular thermal reports, readings … then, in the dark night, the visitors come, as companions of happy hours who would delight with me a sovereign nostalgia.

 

And Groddeck seems to have adopted me, a little as a pet to whom one comment the current events before falling asleep. But in this rather strange night, the events came practically a century off!
« A century, it is exactly the lifetime of Marlene Dietrich. And when I say « occupied », I am certain that you will not have missed to note all the meanings of the word. She was already more than thirty years old when I stopped writing. And nevertheless, the worst as the best of the ambiguities were still in front of her. »

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And he asked the bartender to find an old black disk in the library of the hotel so that we can stay perfectly into the appropriate atmosphere.

 

 » You know certainly the sentence which she was supposed to have written after her stay here? It is true that she addressed only the wealthiest:  » This is the most beautiful Casino in the world – and I know all of them « .

 

Bright, incandescent passage!

 

Nevertheless, I remember having written: « It is certain that these two behaviours: to show and to see, occupy a large place in the human existence and have an influence on all which is human and too human. »

 

The beautiful lady certainly showed herself too much and not always necessarily at the right place, at the best moment. »
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And he remained pensive, while humming at a low voice an air which was rising in the room…

« Sag mir wo die Blumen sind, wo sind sie geblieben Sag mir wo die Blumen sind, was ist geschehen? Sag mir wo die Blumen sind, Mädchen pflückten sie geschwind Wann wird man je verstehen, wann wird man je verstehen?

I plunged at this moment into the reading of Badisches Tagblatt, Baden-Baden, May 24th, 1960 which the PUBLISHER had added inside the thick file of documents he felt absolutely necessary so that I can feed my daily blog.

When my reading came to the end, Groddeck had disappeared and it is Barbara’s record which broken voice had triumphed over the hoarse voice of the icon of a classic cinema.

« Bien sûr, ce n’est pas la Seine, 
Ce n’est pas le bois de Vincennes,
Mais c’est bien joli tout de même,
A Göttingen, à Göttingen.

Pas de quais et pas de rengaines
Qui se lamentent et qui se traînent,

Mais l’amour y fleurit quand même, 
A Göttingen, à Göttingen.

Ils savent mieux que nous, je pense,
L’histoire de nos rois de France,
Herman, Peter, Helga et Hans,
A Göttingen.

Et que personne ne s’offense,
Mais les contes de notre enfance,
« Il était une fois » commencent
A Göttingen. »

20 octobre 2013 20H Baden-Baden 20 October 2013 8 pm

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La lumière du jour s’est éteinte lentement. C’était un beau dimanche. Depuis plusieurs semaines, je passe des journées entières dans le bureau de Lisa Poetschki à lire tous les documents qui concernent le patrimoine de Baden-Baden.

Le soir je me prélasse dans le salon de l’hôtel et j’apprécie les cigares d’une cave qui contient de véritables trésors.

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Georg Groddeck

Ce soir justement je me suis permis d’interroger Groddeck à propos d’Hector Berlioz dont je regarde chaque jour sur la façade du théâtre, le rappel de la création de Béatrice et Benedict.

Comme s’il avait fréquenté le compositeur, il s’est fait un plaisir de me parler de la belle Harriet.

« C’est le 11 septembre 1827 et le 9 décembre 1832 qui font partie des moments les plus forts de leur passion, une des plus passionnantes histoires d’amour et d’obsession de la musique. En ce soir de septembre, au théâtre de l’Odéon à Paris, Hector Berlioz voit pour la première fois Harriet Smithson, celle qui allait devenir sa bien-aimée, jouer le rôle d’Ophélie dans le Hamlet de Shakespeare. Quatre jours plus tard, il la revoit en Juliette, dans une autre pièce célèbre du dramaturge. Il écrit dans ses Mémoires :

« L’effet de son prodigieux talent, ou plutôt de son génie dramatique, sur mon imagination et sur mon cœur n’est comparable qu’au bouleversement que me fit subir le poète dont elle était la digne interprète. »

Il ajoute : « Shakespeare, en tombant ainsi sur moi à l’improviste, me foudroya. Son éclair, en m’ouvrant le ciel de l’art avec un fracas sublime, m’en illumina les plus lointaines profondeurs. »

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Harriet Smithson

Vous savez que Berlioz canalisa son obsession dans la Symphonie fantastique, dont la création eut lieu le 5 décembre 1830 au Conservatoire. Après le concert, un jeune Franz Liszt âgé de 19 ans se présenta et louangea le compositeur.  

Pour sa deuxième exécution, le 9 décembre 1832, Berlioz fit en sorte que des amis y invitent Harriet Smithson. Le programme, intitulé « Épisode d’une vie d’un artiste » et distribué au public avant le concert, décrivait une histoire qui laissait deviner la passion de Berlioz pour Harriet. De son siège au-dessus de l’orchestre, madame Smithson pouvait voir le compositeur. Le livret et l’effet d’un grand orchestre lui faisant la cour touchèrent le cœur de l’actrice. Berlioz écrivit plus tard : « Elle sentit la pièce basculer; elle n’entendait plus un son, mais elle reposait dans un rêve, et à la fin, elle rentra chez elle comme une noctambule, à peine consciente de ce qui arrivait. » Dans les heures qui suivirent, Harriet lui fit parvenir ses félicitations… Neuf mois et demi plus tard, ils étaient mariés, Liszt leur servant de témoin. »

Après m’avoir ainsi séduit par une si belle histoire, Groddeck partit dans de longues explications dont je n’ai pas tout retenu ou plutôt dont il m’a laissé quelques notes avant de disparaître.

Ainsi se termine la 11eme lettre du « Livre du ça » :

« Oui, bien chère amie, c’est ainsi. C’est parfaitement vrai, « l’autosatisfaction » – j’adore le terme – existe toujours, en dépit de l’almour, en dépit du mariage, en marge de l’amour, en marge du mariage ; elle est toujours là, elle ne cesse jamais et restera jusqu’à la mort. Puisez dans vos souvenirs, vous en trouverez la preuve dans un grand nombre de jours et de nuits, dans les jeux amourteux avec l’homme et dans votre imagination. »

Une remarque réellement appropriée ?

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The Sanatorium building of Georg Groddeck

The day went out slowly. It was a beautiful Sunday. For several weeks, I spend the whole days in Lisa Poetschki’s office to read all the documents which concern the heritage of Baden-Baden.

In the evening I relaxed in the lounge of the hotel and I tasted the cigars of a cellar which contains real treasures.
 

This specific evening exactly I questioned Groddeck about Hector Berlioz, certainly beccause I look every day on the facade of the theater, the plaque placed there in tribute to the creation of Béatrice and Benedict.
 

As if he had frequently met the composer, he took a great pleasure to speak about the beautiful Harriet.

« It is on September 11th, 1827 and December 9th, 1832 that thet went through the strongest moments of their passion, one of the most fascinating stories of love and of obsession of music. In this evening of September, in the Théâtre de l’Odéon in Paris, Hector Berlioz sees for the first time Harriet Smithson, the one who was going to become her beloved, to play Ophélie’s role in Hamlet by Shakespeare. Four days later, he meets her again playing Juliette, in another famous creation of the playwright. He writes in his memoirs: « …the effect of her prodigious talent, or rather her dramatic genius, on my imagination and on my heart is comparable only to the upheaval that made me becoming a fan of the poet of whom she was the fascinating interpret. »

He added:

« Shakespeare, by falling unexpectedly, struck me. His flash of lightning, by opening for me the sky of the art with a sublime crash, illuminated me profoundly »

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Hector Berlioz

You know that Berlioz channelled his obsession in the “Symphonie fantastique”, the creation of which took place on December 5th, 1830 in the Academy. After the concert, a 19-year-old young person, Franz Liszt appeared and congratulated the composer. For the second represntation, on December 9th, 1832, Berlioz organized everything in order that friends invite Harriet Smithson there. The program, entitled « Episode of artist’s life » and distributed in the public before the concert, described a story which let guess the passion of Berlioz for Harriet.

From her seat over the orchestra, Madam Smithson could see the composer. The notebook and the effect of a complete orchestra touched the heart of the actress. Berlioz wrote later: « She felt the room falling over; she did not hear a sound, but she remained in a kind of dream, and at the end, she went back home as a night bird, hardly conscious of what arrived. »

Within the hours which followed, Harriet sent him her congratulations… A half months later, they were married, Liszt being invited as an official witness. »
 

Having seduced me by such a beautiful story, Groddeck improvised this long explanation of which I did not understood everything, but he left some written notes before disappearing.

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Baben-Baden Theater

So ends the 11th letter of the « Book of the It”:

Yes, my best of friends, so it is. It is really true that masturbation goes quietly on, in spite of love and marriage, in close connection with love and marriage. It does not cease, it is always there and lasts till death. Consult your own memories, you will find the proof in many a day and many a night, in your love-play with your husband and in your own phantasy life.

Really appropriate?

12 octobre 2013 20H Baden-Baden 12 October 2013 8 pm

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Cigar Lounge. Brenners Park-Hotel & Spa Baden-Baden.

J’avais presque oublié l’odeur du cigare. Il a fallu que je revienne pour une longue période clandestine à Baden-Baden afin de renouer avec une habitude ancienne qui me vient de mon grand-père. Lorsque j’ai repris l’appartement de Rome, l’odeur des havanes imprégnait tous les livres. Il a fallu presqu’une vingtaine d’années pour que cet exotisme sud-américain disparaisse.

En attendant mes hôtes, je me munis d’un livre, je me fais servir un cognac et je fais une étape devant la cave à cigares de l’hôtel. C’est devenu comme un rituel qui me fait passer d’une époque à une autre.

Ce soir je pense que je vais consacrer mon temps à parcourir au moins un chapitre du roman de Groddeck, « Le Chercheur d’âme ». J’ai repensé récemment qu’il s’agissait d’une expression employée par l’EDITEUR lorsque je l’ai rencontré en rentrant d’Enghien-les-Bains vers Acqui Terme en juillet dernier. « Vous serez également des Seelensuchen » ! Vraiment ?

C’est pourtant une des dimensions les plus importantes de mon métier : le récit est le matériau par excellence de la psychanalyse.

Ce roman met en scène un héros aussi improbable je dois dire que notre quatuor voyageur choisi par Valery. Au début, il se nomme August Müller mais deviendra ensuite Thomas Weltein. August Müller lutte contre des punaises qui envahissent non seulement son lieu de vie, mais aussi son psychisme.  Un illuminé ? Un schizophrène ? Un mutant ? Plus vraisemblablement une réincarnation de Don Quichotte qui se dresserait cette fois contre les préjugés sociaux !

Seul contre tous, en quelque sorte !

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Le livre du ça. Georg Groddeeck.

« Quand on s’est enfermé soi-même longtemps dans une pièce étroite mal éclairée, étouffante, uniquement par peur de voir les gens du dehors vous rabrouer ou vous tourner en ridicule, puis qu’on sort au grand air et s’aperçoit que personne ne s’occupe de vous, au pis que quelqu’un lève un instant la tête et passe tranquillement son chemin, on devient presque fou de bonheur. »

 

 

Voilà le commentaire qu’il a ajouté pour moi à son roman en le reprenant d’une des nombreuses lettres fictives qu’il était censé envoyer à « une amie », mais qui constituaient la base d’une discussion avec Freud.

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Baden-Baden.

I had almost forgotten the smell of the cigar. I had to come back to Baden-Baden for a long “secret” period to take up with my former habit which comes from my grandfather. When I inherited the apartment of Rome, the smell of Havana was part of all the books. About almost twenty years were needed so that this south american exoticism disappears.

While waiting for my hosts, I usually open a book, I am being served a cognac and I spend some minutes in the cigar room of the hotel. It became a kind of rite which makes me come from a period of time to another one.

This evening I think that I am going to spend my time browsing at least a chapter of the novel of Groddeck, « The Seeker of Soul« . I reconsidered only recently an expression used by the PUBLISHER when I met him during my travel from Enghien-les-Bains to Acqui Terme last July.

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Georg Groddeck

« You will also be Seelensuchen« ! Really?

It is however one of the most essential dimensions of my job: the narrative is the archetypal material of the psychoanalysis.

This novel stages a hero as improbable – I should say – as our quartet of travelers chosen by Valery. At the beginning he is called August Müller but will soon become Thomas Weltein. August Müller fights against bugs who invade not only his place of life, but also his psyche. A visionary? A schizophrenic? A mutant? Most probably Don Quixote’s reincarnation which would this time fight against social prejudices!

Against the whole world, in a way!

 

 

« When we locked ourselves for a long time into a badly lit, stifling narrow room, only by fear of seeing people from the outside rebuffing you or ridiculing you, then when we go out to the open air and notices that nobody takes care of you, in the udder that somebody raises one moment the head and crosses quietly his or her path, we become almost wild with joy. »

Here is the comment which he added for me to his novel by taking it from one of the numerous fictitious letters which he was supposed to send to « a friend« , but which constituted the content of a discussion with Freud.

9 octobre 2013 22H Baden-Baden 9 October 2013 10 pm

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Paysage de Baden-Baden

Heureusement que je peux pratiquer de longues promenades dans les forêts et le long des vignobles. J’ai absolument besoin d’équilibrer les longues nuits de discussion et d’écoute avec la découverte quotidienne du paysage culturel du Bade-Wurtemberg.

Guy Debord me l’a répété plus d’une fois ; je résume : « J’estime vraies les thèses de Groddeck en général; et dans ce cas d’une manière éclatante : nos maladies, ce sont nos peines. » Finalement j’apprends beaucoup, sinon de Groddeck lui-même, mais aussi de ses amis.

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Ooswinkel. Baden-Baden.

Une de mes promenades préférées, je dirais même répétitive ; celle où je retrouve la dimension sociale du médecin psychologue, est le parcours le long de la rivière Oos, mais c’est bien sûr dans  l’Ooswinkel, ce petit village communautaire sur lequel il a travaillé que je me sens le mieux.

J’y connais maintenant quelques habitants qui ont pris plaisir à me voir leur poser des questions avec mon allemand mâtiné d’accent italien.

 

Ils continuent à constituer une communauté où le partage des décisions se fonde sur une base démocratique.

J’ai même déjà été invité dimanche dernier à venir partager les grillades : une véritable nostalgie ; comme si je retrouvais des odeurs de l’enfance qui se sont enfouies sous les odeurs de la Toscane.

Aujourd’hui je me suis assis sur un banc avec mon dernier livre virtuel : « A tramp abroad » de Mark Twain.

« Baden-Baden sits in the lap of the hills, and the natural and artificial beauties of the surroundings are combined effectively and charmingly. The level strip of ground which stretches through and beyond the town is laid out in handsome pleasure grounds, shaded by noble trees and adorned at intervals with lofty and sparkling fountain-jets. Thrice a day a fine band makes music in the public promenade before the Conversation House, and in the afternoon and evening that locality is populous with fashionably dressed people of both sexes, who march back and forth past the great music-stand and look very much bored, though they make a show of feeling otherwise.”

Même si je suis en permanance pris par les oscillations du temps, j’ai l’impression que rien dans cette ville et son environnement proche n’a vraiment changé.

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Ooswinkel. Baden-Baden.

Good news! I practise long walks in forests and along vineyards. For my health I absolutely need to balance long nights of discussion – and listening – with the daily discovery of the cultural landscape of Bade-Wurtemberg.

Guy Debord repeated to me more than once; I summarize: « On a general point of view, I consider true the theories of Groddeck; and in this case, it is more than clear: our diseases are our sorrows. » Finally I learn a lot, from Groddeck, but also from his friends.

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One of my favorite walks, I would even say a repetitive one, along which I find the social dimension of the doctor, is the path close to the river Oos. But it is of course in Ooswinkel, this small community village on which he worked where I feel quiet. I know now some inhabitants who accepted with real friendship to welcome me and my questions, in spite of my strange german language polluted with Italian accent. They continue today to live in a community’s spirit where sharing of decisions is taken on a democratic basis.

I was even already invited last Sunday to share the barbecue: a real nostalgia for me. I rediscovered smells of the childhood which were buried under the smells of Tuscany.

Today I spend some hours on a bench with my last virtual book: « A tramp abroad » by Mark Twain.

« Baden-Baden sits in the lap of the hills, and the natural and artificial beauties of the surroundings are combined effectively and charmingly. The level strip of ground which stretches through and beyond the town is laid out in handsome pleasure grounds, shaded by noble trees and adorned at intervals with lofty and sparkling fountain-jets. Thrice a day a fine band makes music in the public promenade before the Conversation House, and in the afternoon and evening that locality is populous with fashionably dressed people of both sexes, who march back and forth past the great music-stand and look very much bored, though they make a show of feeling otherwise.

Even if I am permanently torn by the oscillations of time, I have the impression that nothing really changed in this city and its environment.