29 juin 2013 22H Cremolino 29 June 2013 10 pm

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Je me suis tout simplement fait ouvrir hier les portes du Mausolée. Silvia Bo a la gentillesse de faire les honneurs de la Villa Ottolenghi à tous les visiteurs qui cherchent une âme dans tous ces espaces où les propriétaires ont disparu, tandis que leur mémoire s’estompe peu à peu depuis que la plupart des meubles ont été vendus. Elle a accepté de me laisser seul plus de deux heures dans cet espace clos. Je ne pense pas que tous les visiteurs soient dans le même état d’esprit que moi quand ils pénètrent ce bâtiment et s’y enfoncent. En fait il faut certainement considérer que le Mausolée a été le vrai moteur de tout le travail à venir.

La Première Guerre mondiale a laissé sans sépulture tellement de morts que ce sont des paysages entiers qui se sont transformés en mausolées géants. Les monuments dédiés à des soldats inconnus, les arcs de triomphe dédiés aux disparus, pour ne pas parler de tous les monuments aux morts, comme on les a nommés en France, ou aux héros comme ils sont souvent désignés en Allemagne et en Autriche ont peuplé l’Europe de volontés de revanche et n’ont certainement pas évacué les peines.

L’ombre du projet de Mausolée de Gabriele d’Annunzio le Vittoriale dessiné par l’architecte Gian Carlo Maroni, flotte aussi sur l’Italie dans les années 20 comme un symbole auquel on peut s’identifier. Ici il reste un contraste très étonnant entre cette grandeur qui est pratiquement universelle et la destinée familière du lieu. L’espace qui l’entoure est déjà par lui-même une respiration intime, une introduction à la paix éternelle.

Je sais que Valery a écrit sur les ferronneries de la Villa. Celles qui ont été conçues pour l’Herteion sont d’un ordre moins anecdotique : il s’agissait de magnifier des portes qui se ferment sur un épisode terrestre pour magnifier une entrée dans l’au-delà. Les mosaïques scintillent doucement et confèrent une irréalité fabuleuse à un ensemble d’apparitions qui n’ont rien d’effrayantes. Il ne s’agit pas ici de laisser supposer quelque punition éternelle, mais au contraire de revenir aux paysages de Galilée où le Christ pourrait apparaître de nouveau. Il y aura bien sûr un partage des âmes entre celles qui surgiront de l’eau comme si elles venaient juste de naître et celles qui sont condamnées à une errance douloureuse et destructrice. Mais il s’agit d’une évidence inéluctable ; l’atmosphère reste champêtre et accueille les créateurs, architectes, peintres et fresquistes, comme de simples paysans qui se reposent en attendant de revenir à leur œuvre au milieu des animaux du Bon Dieu.

Je vais travailler sur les photographies que j’ai prises. Ce sont des outils d’intercessions avec l’inconnu, une manière d’ouvrir une porte et de rassurer plusieurs de mes malades qui souffrent d’insomnie, en retournant régulièrement à leurs cauchemars macabres.

Photo 32Georg

I quite simply had the doors opened to the Mausoleum for me yesterday. Silvia Bo is kind enough to do the honours and show around Villa Ottolenghi all the visitors looking for the soul of all these spaces where the owners passed away, whilst their memory is bit by bit fading away as the majority of the furnishings have been sold. She agreed to leave me on my own for more than two hours in this closed space. I don’t think that all the visitors may be in the same state of mind as I when they enter this building and delve into it. In fact, it most certainly must be noted that the Mausoleum was the real engine for all the work to come.

The First World War left so many dead without a burial that entire landscapes were transformed into giant mausoleums. The monuments dedicated to unknown soldiers, the arcs de triomphe dedicated to the fallen, not to mention all the monuments to the dead, as they are known in France, or to the heroes, as they are often described in Germany and Austria, have filled Europe with the will for revenge, and have certainly not alleviated the pain. The shadow of Gabriele d’Annunzio’s Mausoleum project Le Vittoriale, designed by Gian Carlo Maroni, hovered over Italy in the 1920s as a symbol with which they could identify themselves. Here there remains a very shocking contrast between this grandeur, which is practically universal, and the informal destiny of the place. The space surrounding it is already an intimate respite in itself, an introduction to eternal peace.

I know that Valery has written on the ironwork of the Villa. Those designed by for the Herteion are of a less anecdotal nature: they idealise doors which close off an earthly phase to magnify an entry into the beyond. The mosaics glisten softly and confer a fabulous unreality to a collection of apparitions which are not at all frightening.  Here, it is not about suggesting some sort of eternal punishment, but instead of returning to the landscapes of Galilee, where Christ could appear once more. There will of course be a division of souls between those that emerge from the water as though they have just been born, and those condemned to roaming in pain and destruction. But it is painfully evident; the atmosphere remains rural and welcomes creators, architects, painters and fresco makers, as simple country folk reposing, waiting to return to their work among God’s animals.

I am going to work on the photographs I have taken. These are tools of intercessions with the unknown, a way of opening a portal and of reassuring several of my insomniac patients, returning regularly to their macabre nightmares.